Gobernadora, Santa Catalina et Sebaco
L’Unesco a choisit d’ajouter l‘île de Coïba dans sa liste du patrimoine mondial pour la richesse endémique des lieux. Tant sur l‘île elle-même où plusieurs espèces et sous-espèces de mammifères, d’oiseaux et de plantes n’existent nulle part ailleurs, que dans les eaux avoisinnantes qui servent de refuges à divers poissons pélagiques et mammifères marins. La richesse de l‘île est en grande partie du à son isolement (une trentaine de kilomètres des côtes) qui limite est les interactions naturelles avec le continent, isolement qui a aussi limité l’installation de l’homme.
Coïba
Les amoureux de la faune prendront plaisir à découvrir ces espèces qu’on ne voit pas ailleurs ou rarement, comme le Ara Rouge, le Hurleur de l‘île Coïba, le Héron Tigre. Coïba est aussi très réputée pour la plongée, sujet sur lequel je ne m‘étendrai pas, puisqu’il m’a suffit d’une petite balade d’une heure en palmes et tuba pour voir coraux, raies, tortue et requins, le tout dans une eau particulièrement claire.
Héron Tigre, une des quelques espèces rares qui se trouvent protégées sur l‘île de Coiba. plus de photos.
L’isolement qui a permis à Coïba de développer cette richesse écologique est aussi à l’origine d’une histoire moins bucolique. Le Panama décida en 1919 la construction d’un pénitencier sur l‘île, l’océan jouant son rôle de frein migratoire sur les espèces comme sur les prisonniers. Plus récemment à l‘époque des dictateurs, Coïba était utilisé comme prison politique par Torrijos et Noriega, sombre mémoire pour beaucoup de Panaméens chez qui le souvenir des desaparecidos est encore très présent. Je vous laisse imaginer ce que certains pouvaient y subir. Si on se renseigne un peu sur Coiba, on ne peut pas ignorer cet épisode de l’histoire au moment où on arrive sur l‘île, lorsque, croisant le long de la côte avant d’accoster le guide nous dit : “les bâtiments là bas au loin, on les voit pas bien, mais c’est les anciens bâtiments du pénitencier”. Silence.
Coïba c’est aussi le souvenir des desaparecidos.
Une des nombreuses plages sauvages de l‘île de Coïba. plus de photos.
Coïba est un lieu étrange, une oasis et une sépulture, lieux de vie et de souffrance. J’ai été surpris par le silence des quelques visiteurs qui se trouvaient sur l‘île en même temps que moi, et de la même manière par l’amnésie des locaux devant l’endroit, eux qui me répondaient par politesse sans me raconter l’histoire. Une sorte d’omertà nécessaire pour ceux qui voudraient vivre des ressources touristiques que propose l‘île et les environs.
Visiter Coïba, une fin en soi
La mangrove sur l‘Île de Coiba ou dans le Golfe de Montijo. plus de photos.
Alors oui, Coïba est un hotspot écologique, c’est vrai, mais finalement qui peut faire la différence entre la réserve de l’Unesco et les nombreuses autres îles de la côte. N’est pas biologiste qui veut et visiter Coïba pour voir “Tito”, le crocodile semi-apprivoisé par les gardiens, n’est pas une fin en soi. Par contre, faire l’effort d’aller voir les restes des bâtiments, les champs travaillés par les prisonniers eux-mêmes, marcher sur les sentiers reliant les différents camps, c’est aussi là que l‘île est intéressante, même si un malaise évident apparait lorsqu’on y vient pour profiter de la beauté des lieux.
Je n’ai d’ailleurs pas trouvé les gardiens très motivés lorsque je leur ai demandé s’il était possible d’aller au sommet de l‘île (un ancien prisonnier connaissant le chemin me l’a proposé). Comme si pour eux, et comme pour les habitants de la région, Coïba n’est pas un endroit où on se balade. Ainsi, le souvenir obscur de cette époque participe à la protection des lieux.
Pour résumer, même si l‘île possède un fort intérêt écologique, je ne pense pas que le tourisme s’y développe tout de suite, et il faut un certain engagement pour s’y rendre, ou le mériter.
Enfin quand même, c’est très beau, c’est un endroit à voir.
Après une pause déjeuner sur un ilot isolé, nous repartons en direction de l‘île Coïba. plus de photos.
Parlons pratique. Se rendre sur Coïba coute assez cher. En effet, la seule manière d’y aller et de traverser les 50 kilomètres de mer qui sépare Santa Catalina de Coïba est de louer un puissant hors-bord. Comptez 100$ entre le bateau et l’essence. En plus de cela, si vous souhaitez passer la nuit sur place, prévoyez un budget supplémentaire de 40$ à répartir entre l’ancre pour le bateau, la chambre, l’utilisation de la cuisine, les droits d’entrée…
Oui, au Panama la devise est le balboa, mais tout se paie en $.
Les environs
Évidemment on ne vient pas depuis Panama City pour la seule beauté de l‘île de Coïba. Santa Catalina, à l’origine un petit village de pêcheurs, puis spot de surf seulement connu des Panaméens, commence à exporter sa renommée auprès de la communauté des surfers backpackers. C’est désormais un endroit où on trouve facilement à se loger, quelques restaurants, une population hétéroclite et une ambiance plutôt sympathique.
Pour encore plus de calme, je vous suggère d’aller sur la petite île de La Gobernadora. Ici par contre, pas de route ni voiture, quelques habitants qui vivent de la mer et de leur culture, une véritable sérénité. Un couple de Français (Valérie et Yves, Art Lodge Land Art) y vit depuis 7ans et propose depuis quelques temps un hébergement où on peut s’installer quelques jours.C’est à mon avis une des meilleures solutions pour profiter de la région : camp de base sur Gobernadora où vous pouvez vous reposer et profiter des lieux, puis vous balader sur le sentier qui fait le tour de l’ile, et le lendemain partir à la pêche traditionnelle avec les pêcheurs de l’île. Vous pouvez aussi organiser une excursion vers Cebaco la grande sœur voisine, et bien sur partir à Coiba et faire étape à Catalina à l’aller ou retour.
Santa Catalina – Gobernadora – Cebaco Coiba
Comment s’y rendre
Depuis Panama City, prendre le bus jusqu‘à Santiago vers l’ouest, puis 2 options :
- vous visez Santa Catalina et dans ce cas prolongez jusqu‘à la petite ville de Soná d’où vous prenez un bus local pour Santa Catalina;
- vous allez directement sur Gobernadora, voyez avec Valérie. Dans ce cas, prenez un bus pour le petit local village de Puerto-Mutis où un bateau vous emportera sur l‘île en longeant la mangrove du Golfe de Montijo.
Ambiance sans le son dans le bus local qui conduit de Soná à Santa Catalina. plus de photos.
Prendre les transports en commun de campagne, c’est aussi l’occasion de profiter de l’atmosphère très vivante et propre aux bus latinos, musique à fond, arrêts sur demande, transport d’animaux et service de livraison de colis. Vous aussi que la route qui mène à Catalina est toute neuve, l’avantage peut-être d’avoir un président de la République (Ricardo Martinelli) originaire du coin.
Une fois sur place, rien de plus simple pour ce qui concerne la traversée sur Coïba, tout le monde ou presque vous y emmènera. Si vous cherchez à packager la région dans le cadre d’un voyage plus long au Panama, vous pouvez contacter Tucaya qui m’a aidé à organiser mon voyage au Panama.